Recherche inaboutie

J'essaie le petit jour ce matin, je ne l'ai fait qu'une fois sur mon territoire de chasse.
Je me mets en marche alors que les premières lueurs du jour apparaissent dans le ciel, l'air est encore bien frais et tout est calme dans le découvert.
J'entre sous les arbres et commence à humer et écouter: pas de bruit, peu d'odeurs... Je ne verrai pas grand chose hormis quelques cerfs qui m'ont repéré bien avant que je ne devine leur présence!
Je poursuis ma marche et je me dis que je vais profiter de la fraîcheur et du beau temps pour reconnaître des zones encore inexplorées.
Habituellement, je chasse en fin de journée, avec la nuit comme limite. Ce matin, je peux tranquillement poursuivre mon exploration, j'ai du temps devant moi. Ainsi, je découvre une zone très intéressante, manifestement très fréquentées par les suidés. Une odeur m'alerte, il y en a un pas loin... Je reste très silencieux et progresse tout doucement sans pourtant rien voir du tout... l'odeur est toujours là, je continue ma progression silencieuse; puis pour pouvoir continuer ma marche, je dois faire un écart pour éviter des branches mortes au sol, et je marche sur une coquille d'escargot qui était cachée sous deux ou trois feuilles! Craaac! Dans le quart de seconde, un tas de feuille explose à à peine cinq mètres de moi dont deux jolis noireaux d'une vingtaine de kilos surgissent en grognant!! Je suis tellement surpris que je n'ai même pas songé à armer!! Ils étaient déjà gîtés et je les ai surpris dans leur sommeil!
Je les regarde s'enfuir, un peu coupable d'avoir réveillé la petite famille qui s'éloigne visiblement très contrariée!! Je reprends ma reconnaissance, le soleil est levé il fait bien clair maintenant. J'emprunte une coulée qui surplombe légèrement le petit cours d'eau que je longe pour avoir une vue plus large. J'aperçois un banian aux larges racines, et je me dis qu'une petite pause assis à l'ombre de l'arbre sera bien agréable...
J'approche l'arbre sans plus de précautions quand soudain, une racine "prend vie" et une jolie laie d'environ quarante kilos surgit du tapis de feuilles!! Elle était parfaitement invisible, mais je suis moins surpris que la première fois, et le réflexe ne me fait pas défaut. Comme elle met tout de même quelques secondes à s'extraire du gîte, j'ai le temps d'ajuster une flèche à une douzaine de mètres. A cette distance, mon tir est sûr et en quelques secondes, l'animal transpercé par ma flèche disparait dans le ruisseau en contrebas en grognant et soufflant très fort. Je m'approche de la flèche, fichée dans la racine: elle est enduite de sang, et je ne détecte pas d'odeur de panse ni d'intestin... L'atteinte pourrait être bonne, toutefois, je suis inquiet, car à la décoche, la laie était bien entendu en mouvement et le sang sur la flèche ne me semble pas assez rouge pour provenir du coeur ou d'un poumon.
Je patiente difficilement dans l'angoisse, reniflant encore la flèche avant d'entamer une recherche qui sera bien plus longue que je ne l'imaginais!
La piste est bonne, mais le sang définitivement pas assez oxygéné à mon goût... Les premières gouttes sont rapidement remplacées par des projections plus importantes, plus faciles à voir et à suivre. Malheureusement, au fur et à mesure de mes recherches, je constate qu'il y a de moins en moins de sang, et que les gouttelettes sont de plus en plus espacées! Plusieurs fois, j'ai cru la piste arrêtée, et plusieurs fois j'ai retrouvé une petite goutte de plus en plus loin de la précédente.. La piste est infime, je la suis depuis trois heures...! Encore une petite goutte, puis plus rien... J'angoisse, je m'en veux d'avoir pris la décision de tirer, blesser sans tuer est ma hantise depuis que j'ai commencé à chasser à l'arc! Je hume l'air, il ma semble sentir une odeur... de toute façon, il n'y a plus de sang sur trente mètre autour de la dernière goutte, je décide de suivre mon nez. La progression est très lente, j'attends souvent que le vent tombe pour m'assurer de la direction à prendre, me fiant toujours à mon nez... Soudain, je retrouve une grosse trace de sang sur les feuilles, la laie a dû se poser la quelques instants, je remercie mes parents de m'avoir doté d'un si bon odorat! Quelque peu rasséreni, je reprend la piste de sang; quelle distance a-t-elle bien pu parcourir, tout cela me semble bien long, je sais maintenant que ma flèche était loin d'être parfaite... Les gouttes sont progressivement minuscules puis... définitivement introuvables. Après avoir parcouru une zone de près de cinquante mètres de rayon autour de la dernière gouttelette aperçue, je dois me résigner à abandonner... Après cinq heures de recherches infructueuses, je suis complètement démoralisé et la culpabilité me ronge... J'ai probablement gravement, peut-être même mortellement à terme, blessé un animal que je ne retrouverai pas... je me sens mal, comme un con sous le soleil qui brille bien haut, il est midi, je suis parti à quatre heures et demie...
Pas de chien de sang dans le coin, je suis nerveusement rincé... fais ch...

merde ...... 

que dire de plus ....

Ton histoire est la hantise de tous les chasseurs à l'arc. C'est peut être aussi une simple atteinte musculaire qui saigne mais sans plus de gravité. Peut être un jour tu reverras cet animal avec une cicatrice.....
Courâge à toi.

corbow a écrit:Ton histoire est la hantise de tous les chasseurs à l'arc. C'est peut être aussi une simple atteinte musculaire qui saigne mais sans plus de gravité. Peut être un jour tu reverras cet animal avec une cicatrice.....
Courâge à toi.

C'est exactement ce que j'espère ardemment! Merci les gars...

désolé de te saper le moral mais c'est le risque qu'on a quand on chasse.
et ton animal peut très bien être mort quelques dizaines de mètres plus loin que la fin de ta recherche.
 
ce serait faire preuve de beaucoup d'idiotie que de te dire "je sais ce qu'il lui est arrivé".
une atteinte musculaire par forte chaleur est loin d'être anodine et entrainera sa mort par infection ou il sera dévoré par les mouches et asticots (il doit y en avoir aussi en N.C) ou pas.
une flèche de tripaille donnera le même résultat.
un atteinte même parfaite permet parfois de les voir tomber à vue, mais aussi de leur permettre de faire jusqu'à plusieurs centaines de mètres avec une flèche de poumons ou de cœur (si ce n'est pas si parfait que cela), il n'y a pas de règle pour ca.
le stress, la peur, la douleur ou le fait d'être suivie par des petits peuvent tout changer en terme de résistance.

et rassure toi, même avec un chien, ca ne fonctionne pas toujours.

Tu ne sapes pas mon moral Spitz, ton honnête lucidité est certainement de bon aloi et fort instructive; c'est là un des intérêts majeurs de notre plate-forme d'échange!
Je fais mes début de chasseur à l'arc, et même de chasseur terrestre tout court (j'étais plutôt orienté mer jusqu'à présent!), ainsi je suis bien heureux de pouvoir glaner tant de précieux conseils de "vieux chasseurs" (ça n'est pas péjoratif!).
Je resterai philosophe : il y a toujours plus d'enseignements à tirer d'une défaite que d'une victoire...

PS : on n'échappe pas vraiment aux mouches ici, je pense qu'avec la chaleur, on est même très très bien servis!!

Merci pour le partage!

Bravo pour ta perceverance et dommage pour ta malchance!  

Malchance car souvent la réussite se joue à peu de chose... tu n'as pas à t'en vouloir, tu as donné le meilleur de toi...

pas de bol ! 
mais c'est pas pour ça qu'il faut baisser les bras et laisser tomber l'arc.
les mauvaises fléches tout le monde en a fait.
ça fait partie de l'acte de chasse.
l'important est que tu en retire des leçons,  donc du positif à court et long terme.
c'est comme ça que l'on se forge.
bon récit quand même ! 
merci de l'avoir partagé.

le fait que ça te tourmente est également bon signe et prouve le bonhomme que tu es ..... 

alors : 

je n'ai jamais tiré sur du gros et j'avoue que c'est ma hantise aussi ....

allez, repost nous vite un récit avec une belle photo !!!! 

et oui il est bien difficile pour ne pas dire impossible de chasser raisonnablement avec un arc sans un chien de sang  ...... 
attention aussi au délai avant d' y aller jamais vite après..... 
peut être faut il envisager de former un chien si personne n'en a .. un petit teckel pourrait faire déjà les quelques dizaines de mètres que tu n'a peut être pas réussi a faire seul et te permettre de trouver une bête bien fléchée pas trouver sans le chien( situation malheureusement très classique )  avec une formation pas très poussée si ton chien est mis a la voie assez vite en délai il est plus que probable qu' il te donnera une capacité a suivre la voie sur une longueur bien plus grande que seul
a réfléchir 

shit happen ...

Oliv' a écrit:

corbow a écrit:Ton histoire est la hantise de tous les chasseurs à l'arc. C'est peut être aussi une simple atteinte musculaire qui saigne mais sans plus de gravité. Peut être un jour tu reverras cet animal avec une cicatrice.....
Courâge à toi.

C'est exactement ce que j'espère ardemment! Merci les gars...

J'espère que c'est la même chose dans mon cas. J'ai perdu mon premier sanglier de 40 kg environ tiré à 5-7m avec mon arc à poulpe. J'aurais dû faire la recherche le lendemain, surtout en ne sachant pas où je l'avais atteint. Je l'ai faite le soir même et je l'ai relevé. Le lendemain, un conducteur de chien de sang est venu, 20h après l'avoir relevé. Mais, malheureusement, il ne l'a pas retrouvé. Je pense qu'il ne perdait plus de sang.

Ici, on ne peut se permettre une recherche le lendemain en cette saison, les nuits sont beaucoup trop chaudes, la viande serait gâtée...

Du coup, ça met un peu de pression supplémentaire pour tirer au soleil couchant, on gamberge facilement sur la recherche de nuit à suivre!
Mais bon, je ne me plains pas, ça pourrait être largement pire: habiter dans une grande ville et devoir me régaler de la chasse sur Seasons!!

spitz a écrit:désolé de te saper le moral mais c'est le risque qu'on a quand on chasse.
et ton animal peut très bien être mort quelques dizaines de mètres plus loin que la fin de ta recherche.
 
ce serait faire preuve de beaucoup d'idiotie que de te dire "je sais ce qu'il lui est arrivé".
une atteinte musculaire par forte chaleur est loin d'être anodine et entrainera sa mort par infection ou il sera dévoré par les mouches et asticots (il doit y en avoir aussi en N.C) ou pas.
une flèche de tripaille donnera le même résultat.
un atteinte même parfaite permet parfois de les voir tomber à vue, mais aussi de leur permettre de faire jusqu'à plusieurs centaines de mètres avec une flèche de poumons ou de cœur (si ce n'est pas si parfait que cela), il n'y a pas de règle pour ca.
le stress, la peur, la douleur ou le fait d'être suivie par des petits peuvent tout changer en terme de résistance.

et rassure toi, même avec un chien, ca ne fonctionne pas toujours.

Bien dit

stak a écrit:... attention aussi au délai avant d' y aller jamais vite après.....

Question de béotien (désolé ) : pourquoi ? Pour éviter la confrontation potentiellement dangereuse avec la bête blessée ?

Pour ne pas la relever, si elle s'est posée quelque part pour mourir, le fait de venir lui mettre la pression trop tôt peut déclencher un sursaut d'instinct de survie et la bête peut repartir de plus belle... et là, pour la retrouver, tes chances baissent proportionnellement à ladite pression!

cette histoire de délai est absolument déterminante
quand on chasse avec un arc
un animal relevé est très difficile a retrouver surtout le chevreuil y compris avec un chien de sang ,
la plupart des betes tirées avec un arc se couche très vite , parfois après quelques dizaines de mètres parcourues
si vous attendez  la bete s'engourdi et finit par mourir sans repartir( si la blessure est rsuffisamment sevère )
il ya  un délai classique d'une demi heure , jamais avant a mon avis
après dans certaines circonstances on peut l'allonger de manière très importante
je vous donne un exemple
un faon tiré en montagne la saison 2015 , on est avec mon bavière et il y a deux hanovre sur place( pas très loin chez un conducteur du coin ) un très expérimenté , la flèche nous semble mauvaise trop arrière sur le tir
il fait froid le tir est dans l' après midi mais on a le temps de faire la recherche avec le bavière qui n'est pas très expérimenté
on décide d'attendre et la recherche se fera le lendemain avec un long délai  le hanovre qui fait le pistage n' a aucune difficulté pour retrouver la bete qui en fait avait une bonne blessure, si la blessure avait été moins bonne on l'aurait relevé très fatigué au même endroit et on aurait augmenté considérablement nos chances de l' attraper avec le chien
le délai est volontairement très long sur cet exemple , on pouvait; le faon était au réfrigérateur   d'ailleurs on l' a mangé après et il était délicieux
le soir sur une blessure douteuse rechercher le lendemain est logique , la seule limite a cette stratégie est la météo( c'est l'une des raisons qui doit rendre prudent sur le fait de chasser tard le soir en plein cagna)
attendre tranquillement quelques heures au moindre doute est surement la logique; je dirais que c'est encore plus vrai si on n ' a pas de chien de sang disponible
 
pour le sanglier , j'aurais tendance a conseiller d’allonger les délais au moindre doute sur une flèche qui n'est pas très bonne quelques heures et surtout surtout de ne pas se manifester juste après le tir ou commencer a faire la piste juste après .... 30 minutes quand on vient de tirer l' un de ses premiers animaux avec un arc c'est extrêmement long
il faut se retirer tout doucement de la zone de tir et y revenir par la suite après avoir regardé sa montre ou téléphoné a un copain 

bonjour oliv

bin dommage tous ça  mais bravo pour cette persévérance et un grand merci pour le partage qui et très instructeur pour un débutant comme moi
bien plus qu'un récit ou tout ce passe bien finalement